Une histoire GRATUITE et inédite ICI 

Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

Fuck IA

Pour une Littérature et un Art sans IA (intelligence artificielle)

Une fois n’est pas coutume. Moi qui utilise la fiction pour régler mes comptes, j’ai décidé de mouiller le soutif avec mon manifeste anti IA ! Je n’ai pas d’autre légitimité que de me considérer une auteure, une artiste. Qui crée avec passion. Et qui ne désire rien de plus que de pouvoir continuer, et d’être rémunérée pour ça. Si vous êtes sensible à mon analyse, je vous invite à la partager, parce que bon sang… ça commence déjà à puer. C’est MAINTENANT qu’il faut se réveiller !

Art et « intelligence » artificielle : piller les uns pour gaver les autres.

Non, désolée, contrairement à ce qu’on veut nous vendre pour nous enfiler de gros godes à sec, toutes les « disruptions » ne sont pas vertueuses. IA et Art ne devraient pas pouvoir cohabiter dans la même phrase. Il faudra me passer sur le corps pour que j’intègre l’intelligence artificielle dans ma création artistique.

Pour celles et ceux d’entre vous qui me suivez, vous savez que j’écris depuis peu. Pourtant je n’ai pas vu — comme beaucoup d’entre nous — la claque venir. Regardez Facebook, Instagram avec ces images dingues, des déclarations d’éditeurs submergés de manuscrits IA… La révolution de l’IA est en marche dans l’illustration, la littérature, la vidéo, la musique… partout dans l’Art.

Passée la dimension de jeu, la découverte d’un nouvel outil et de ses possibilités impressionnantes, certains y voient déjà une opportunité commerciale : celle de produire (« produire », pas « créer » !) plus, plus vite, pour moins cher. À quoi s’emmerder à payer un.e illustrateur.ice, un.e traducteur.ice, à se fatiguer à porter un livre en soi pendant des mois alors qu’il suffit de quelques commandes pour qu’une machine fasse le boulot à notre place et fort gracieusement. Dessinateur.ices de BD, scénaristes, concepteur.ices de jeux, musicien.nes, audio-visuel… tout le monde va être impacté. Demain, sans aucun doute, on se rendra sur Netflix ou équivalent et, de quelques ordres, le système nous fabriquera un film sur mesure, avec nos ingrédients préférés (« je veux du suspense, et une histoire d’amour qui se passe à Londres, et un héros qui ressemble à machin »…).

Du prêt à digérer, du facile, du confortable, de l’attendu, du doudou, de l’abêtissant. Pas quelque chose qui va nous surprendre, nous bousculer, nous pousser à nous ouvrir au monde ou à nous remettre en question…

Oui, les outils informatiques n’ont cessé d’évoluer ces dernières années, et personne n’en est mort. Peut-être. Mais l’ampleur des changements n’avait rien à voir. Avec l’IA, on ne parle plus d’outils performants, on parle d’outils capables d’écrire des phrases, de produire une image, qui vont puiser et piller l’intégralité du patrimoine artistique de l’Humanité, pour le traiter, le remodeler… Et mimer l’écrivain.e, le(a) photographe, le(a) dessinateur.ice, le(a) musicien.ne…

 

Création artistique versus production à la chaîne.

Pour ce que je connais, écrire un livre, c’est mettre beaucoup plus en œuvre que d’agencer des mots les uns derrière les autres. Écrire, c’est réveiller son imagination. Pousser son sens de la réflexion dans ses retranchements, pendant des semaines, des mois, parfois des années. C’est prendre de la glaise et la travailler encore et encore, la nourrir de notre vécu, de nos humeurs, de nos rencontres. Cela pour en faire quelque chose d’unique, que personne d’autre que nous n’aurait pu créer.

Une création artistique se rêve, se fantasme. Elle porte dans son ADN la personnalité de l’auteur.e, ses amours, ses peines, ses espoirs, ses colères, sa vision du monde…

N’en déplaise à ceux qui se découvrent une vocation d’écrivain avec l’intelligence artificielle. Pour moi, il n’y a pas de sous-littérature, mais donner des commandes à un robot ne fera jamais de vous un écrivain ! Tout comme réchauffer un plat surgelé au micro-ondes ne fera jamais de vous un cuisinier ! On n’est pas médecin parce qu’on s’autodiagnostique une grippe. On n’est pas coureur de rallye parce qu’on se tape un délire sur une route de campagne. L’IA dans l’Art, c’est l’illusion que tout le monde est artiste.

Être un artiste (et je dis ça avec l’humilité de ma très jeune carrière — je découvre chaque jour la complexité et l’exigence de cette vocation), c’est déployer des trésors de patience, transpirer sur sa création, douter, y consacrer des jours, des nuits, ne penser et ne vivre que pour ça. Ce n’est pas balancer des livres et des illustrations produites par des robots pour se faire mousser.

Une démarche créative, ou des compétences exceptionnelles dans une activité, ce n’est pas inné pour la majorité d’entre nous, c’est le fruit de centaines, de milliers d’heures d’entraînement et de labeur acharnés. Et c’est un processus vertueux.

Un artiste grandit dans son art à mesure qu’il crée. Produire avec une IA ne permettra jamais de grandir, sauf dans la capacité à utiliser l’outil informatique.

Et pour celles et ceux qui s’en tapent encore de ce que je raconte, qui me trouvent naïve, idéaliste… N’oublions pas que le marché n’est pas extensible. Oui, on peut être tenté de produire beaucoup, vite avec des IA, pour créer un effet de volume, enterrer les autres et vendre plus. Mais c’est une course en avant mortifère. Le temps de cerveau dédié à la lecture est déjà en chute libre, concurrencé par d’autres médias qui eux aussi proposeront toujours plus de contenu produit vite et pour pas cher. Cette course est intenable, produira de la non-qualité et nuira à la diversité de ces productions (« productions », pas « créations » !).

Demain, avec l’IA dans l’Art, comment des créateur.ice.s exceptionnel.le.s auront-ils(elles) l’espace et le temps pour naître et s’exprimer dans un brouhaha et une indigestion de productions assistées ? Verrons-nous encore émerger des Rothko, Vivienne Westwood, Anne Rice, Richard Wagner…?

Créer, c’est exprimer de l’amour, de la passion, de l’obsession, de la folie, frôler le génie. Sa capacité à créer est ce qui fait la beauté de l’être humain.

L’Amour et l’Art sont peut-être tout ce qu’il reste à sauver dans ce monde de plus en plus merdique. Et nous sommes sur le point d’abandonner cela à des machines, au prétexte que c’est l’avenir et la marche du progrès.

 

« L’IA va créer de la valeur ! ».

Pour quoi ? Pour qui ? Pour quoi faire ?

Je ne doute pas que l’intelligence artificielle, si elle est encadrée, régulée, supervisée par l’Homme, apportera des bienfaits. C’est déjà le cas par exemple dans le diagnostic en imagerie médicale (bien qu’un.e radiologue, avec son expérience, pourra ne pas être d’accord non plus).

On pourra argumenter que l’IA va aider, assister, libérer de tâches fastidieuses… MAIS où le curseur sera-t-il placé dans nos sociétés capitalistes où il n’y en a que pour le fric ? Culture de la facilité, du pousse-bouton, dépendance à la technologie, compétition, recherche de marges et de profits, accélération, hyperconsommation… Ce n’est pas ce que j’appelle Bonheur et Progrès.

La seule valeur que l’IA va générer dans l’Art, ce sont des économies réalisées sur le dos des créateurs. Nous. Nos amis. Des membres de notre famille. Des artistes qu’on admire.

Des personnes qui peinent déjà à tirer un revenu de leur peinture, écriture, photographie… ou qu’on ne prend pas au sérieux par méconnaissance de la somme et de la difficulté du travail qu’elles abattent. En la matière, c’est un vœu, un espoir, une bouteille à la mer : arrêtons tout de suite de cracher à la gueule de notre prochain ! De le piller, de laisser un robot puiser dans ses créations sans le rémunérer en retour.

Ce serait hypocrite de se draper ou se bercer d’une future législation. Peut-être faudra-t-il attendre vingt ans, et supporter de regarder certaine.es de nos représentant.e.s politiques enculer des mouches avant de pondre des demi-mesures.

C’est à nous, citoyen.nes, consommateur.ices, de prendre nos responsabilités. Consommer de l’IA, c’est tuer l’Art. Produire avec de l’IA, c’est préparer le bâton pour se faire battre ou se faire mettre.

Produire massivement, c’est exacerber la concurrence. Obliger tout le monde à baisser les prix pour exister. Et c’est le retour de la bonne vieille spirale à la baisse, et du jeu de cons d’auto-cannibalisation.

 

IA et autoédition.

Nous, écrivain.e.s qui nous auto-éditons avec sérieux et amour du travail bien fait, nous sommes particulièrement exposés. Au moment précis où le marché français frémit sous la poussée d’auteurs qui font leurs bagages de leur maison d’édition (pour des raisons qui leur sont propres), où des prix littéraires commencent à être décernés à des auteurs auto-édités, voilà un outil qui va donner à tout un chacun des ailes pour tenter de nous tailler des croupières. À force de mauvais romans auto-édités propulsés par des IA, c’est nous toutes et tous qui allons subir défiance et critiques. Et, au final, le seul rempart sera probablement le « label » d’une maison d’édition, ou l’attachement affectif de notre lectorat existant.

 

Choix individuels, répercussions collectives.

Je ne prétends pas avoir les mains propres, ni donner des leçons, ni servir d’exemple. Vraiment pas mon genre ! Mon activité d’écrivain, c’est de l’artisanat, un lectorat de niche, beaucoup de « do it yourself », des banques de photos libres de droits… Je me suis déjà laissée attraper par de l’« ia-art » que j’ai reposté sur mes réseaux sociaux. Et j’ai compris ce que c’était.

Pour cette raison, je ne likerai et ne reposterai plus les publications où des IA interviennent, même celles de collègues auteur.es ou d’ami.es. C’est une manière d’aller au bout de ma conviction. J’y serai vigilante à l’avenir.

Je choisis, en l’état actuel, de ne pas recourir à des IA pour des recherches, la rédaction de mes textes, mes couvertures… De travailler avec mon jus de cerveau, ma passion, ma patience, Word, Canva et Antidote (qui, pour l’instant, est un correcteur performant, mais n’écrit rien et ne décide de rien à ma place). Je revendique d’être une auteure, une écrivaine ou une autrice, ou une écrivenimeuse :), qui écrit sans IA, qui propose des romans et des nouvelles sans IA. C’est entre moi, mon cerveau et mon intégrité.

Je sais que j’aurai beau freiner des quatre fers, je vais me faire rattraper, parce que l’IA va être intégrée progressivement dans tous les outils et domaines de notre quotidien. Et que sauf à taper à la machine au fond d’une grotte, il faudra composer. Mais on peut composer avec une attitude responsable, un regard critique, une éthique. Accepter des choses, en refuser d’autres. Rester intègre. On peut faire le choix de la lenteur, de la fierté du labeur, et refuser de céder à cette course à la production et la consommation qui nous conduit déjà — entre autres — vers une banqueroute écologique.

C’est un effort individuel et un choix humain que nous pouvons tous faire. Il ne coûte rien.

Je suis une personne de chair et de sang. Souvent, je fais la gueule. Parfois, je suis de mauvaise foi. J’ai des textes moins bons que les autres. J’écris par passion, avec mes tripes, mais cette activité n’est pas gratuite, la passion ne libère pas des contingences. J’ai aussi des factures à payer.

En achetant et en produisant avec de l’IA, vous m’appauvrissez et appauvrissez d’autres artistes.

Je ressens de la peur, mais surtout beaucoup de tristesse pour nous tous : artistes et non-artistes. Si je dois faire la pute (métaphoriquement, j’espère) pour payer mes factures, je ne pourrai plus écrire autant, et je serai malheureuse.

C’est ça, la réalité des choses : décider de contribuer au bonheur ou au besoin viscéral des artistes à rendre le monde plus « beau », plus libre, à le questionner à travers l’Art, ou se jeter sur le dernier jouet ou la dernière opportunité commerciale et « après moi les autres et le déluge ».

Partager cet article :
Picture of Violaine De Charnage - Ecrivenimeuse

Violaine De Charnage - Ecrivenimeuse

Violaine De Charnage est une auteure, nouvelliste et romancière, qui préfère se qualifier d’Ecrivenimeuse. L’imaginaire, et plus spécifiquement les genres de l’horreur, du gore et du fantastique, lui servent de terrains de jeux littéraires et funèbres pour exprimer ses angoisses et révoltes.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *